« L’instable »

Publié le Mis à jour le

ATTENTION : propositions anonymes à envoyer avant le 15 septembre 2023.

  • Date : 21 et 22 mars 2024
  • Lieu : Université Toulouse II Jean Jaurès
  • Adresse : 5 allée Antonio Machado 31100 TOULOUSE
  • Contact : Blandine Pennec
  • E-mail  : blandine.pennec@univ-tlse2.fr

APPEL À COMMUNICATIONS

L’instable : langages et représentations
(dans le monde anglophone)

La notion d’instable, renvoyant à une absence de stabilité relativement à un point ou état pris comme repère, peut être comprise en termes de position non fixe, révélant un manque de maintien ou un déséquilibre, mais aussi en lien à du mouvement : l’instable peut alors être entendu comme le caractère de ce qui est mobile, mouvant, se déplace ou peut être déplacé. Mais l’instable peut aussi être fondamentalement lié à la temporalité : est alors instable ce qui ne dure pas, ce qui est précaire, qui peut éventuellement se dégrader ou se transformer. La question de l’identité d’un élément instable se pose alors : en effet, comment un élément donné peut-il être toujours le même si ses caractéristiques fluctuent ou évoluent ? La question adjacente qui se pose est celle du caractère intrinsèque ou extrinsèque de l’instabilité : en effet, un domaine ou élément peut être instable par nature, ou encore en raison de son environnement qui le déstabilise. Par ailleurs, des connotations négatives peuvent être associées à ce terme d’instable, notamment dans le domaine psychologique. Toutefois, l’instable peut également être valorisé dans certains champs. Le caractère éphémère de certains objets constitue une source d’attractivité, dans le domaine artistique par exemple. L’instabilité peut en effet constituer une force créatrice. En ouvrant un espace de jeu, un lieu des possibles, elle accorde une liberté émancipatrice au sujet, qui, en s’affranchissant des normes langagières ou du canon, contribue à l’établissement de nouvelles formes d’expression. La stabilité, quant à elle, peut mener à une certaine stase, une forme d’immobilisme. La stabilité serait ainsi du côté de la tradition (à l’origine du processus de normalisation), là où l’instabilité serait associée à la transgression (pouvant donner naissance à des contre-cultures). Ces deux notions incarnent donc des manières d’aborder le monde.
La notion d’instable fera ainsi émerger différents questionnements permettant d’articuler le domaine de la langue, de la traduction, de la cognition, des arts, de la littérature, et de la réception des œuvres.

Du point de vue de la langue, l’instabilité, autrement dit l’évolution des formes langagières (ou éventuellement leur disparition), est inhérente à son fonctionnement, et peut être interrogée en lien avec la question d’éventuelles résistances au changement. L’instabilité du sens en synchronie est quant à elle à l’origine de phénomènes tels que la deixis, la polysémie, l’homonymie, pouvant être examinés en lien avec leurs effets sur l’intercompréhension. L’instabilité fonctionnelle est également fondamentale en langue, se manifestant par des phénomènes constants de recatégorisation (ex : grammaticalisations). La question de l’instable est en fin de compte au cœur du système de la langue, et se traduit par une déformabilité et une plasticité qui en constituent des traits nécessaires. Des phénomènes de variations (notamment à l’oral) sont par ailleurs inhérents au passage de la langue au discours. Les procédés de défigement d’expressions figées, et le jeu qu’ils entraînent, constituent quant à eux des aspects caractéristiques de certaines productions discursives, et peuvent susciter des questions d’interprétation ou de réception. Tel est également le cas des doubles sens (sous-entendus, euphémismes, métaphores), entraînant parfois des fluctuations interprétatives.

Du point de vue de la traduction, se pose en outre la question du statut même et de la stabilité interprétative du texte original, ce dernier étant toujours passible de nouvelles lectures, de nouvelles interprétations par cette « langue de continuation » qu’est la traduction. Se pose notamment la question du degré de proximité vis-à-vis du texte source, illustrée entre autres par les difficultés particulières posées par la traduction de l’humour et des jeux de mots, ou encore des slogans. La traduction de voix minoritaires est également source de fluctuations, ouvrant la voie à la déstabilisation de certains héritages idéologiques. Par ailleurs, la question du statut du traducteur (et son éventuelle précarité, ou encore la ré-invention de son métier) peut aussi être évoquée, en lien avec l’émergence de traducteurs non professionnels, mais aussi l’extension du champ de la traduction automatique.

La place de l’intelligence artificielle est, de manière plus générale, source de déstabilisation de certaines pratiques humaines et du fonctionnement cognitif, étant donné que l’humain s’en remet, consciemment ou non, à la machine, ce qui conduit à une transformation de ses mécanismes intellectuels. Ses processus attentionnels sont aussi modifiés par les nouvelles technologies, venant distraire ou happer l’individu, ce qui pose la question du libre arbitre.

L’instable est aussi au cœur de différentes stratégies artistiques et littéraires. On peut songer à ce propos aux processus de déstabilisation qui peuvent sous-tendre la littérature (terrain de jeu de narrateurs non fiables, voix qui s’auto-corrigent, brouillages énonciatifs et référentiels, points de vue mouvants et non clairement balisés, etc.) et s’avèrent source de nombreuses expérimentations, ou encore au retravail des mythes. Le terme même de “représentation”, qui consiste donc à “présenter à nouveau”, invite à une réflexion sur l’écart entre la réalité de la chose représentée et l’imaginaire qui en découle, dans des approches esthétiques s’inscrivant ou non dans une tradition mimétique. L’examen des enjeux politiques de cet écart permet de prendre en compte la portée potentiellement subversive de l’œuvre. Le contexte idéologique de telles transformations ou transgressions pourra notamment être examiné. La littérature pose en outre fréquemment la question du lien entre mémoire et identité, sachant que l’une comme l’autre ne sont pas nécessairement stables, peuvent évoluer, se réinventer, et dépendent étroitement de mises en récit. Dans le domaine du théâtre, le passage du texte à la mise en scène peut constituer une première source de distorsions. Par ailleurs, la question de la déstabilisation des représentations, ou encore de l’ordre établi, est au cœur de la dramaturgie et des mises en scènes contemporaines. Corrélativement, les représentations du seuil, du liminal, de l’entre-deux constituent des enjeux de taille pour les arts et la littérature dont les pratiques et les limites peuvent se trouver redéfinies.

La question de l’intermédialité est également source d’enrichissements, mais peut parallèlement générer certaines formes de brouillage menant à une hybridation des genres et, le cas échéant, à des tensions fortes entre tradition et contre-culture. Ainsi, dans le domaine des arts audiovisuels (et notamment dans les séries), de nouvelles expérimentations conduisent à s’affranchir des codes traditionnels : elles peuvent donner lieu, par exemple, à des productions faisant fi de l’ordre linéaire habituel pour offrir des expériences de visionnage uniques par une réorganisation des épisodes selon les choix individuels des récepteurs.

Qu’il s’agisse de textes littéraires, de productions théâtrales ou audiovisuelles, ou même de conversations ordinaires, la question de la réception est un domaine où l’instable règne en maître. L’interprétation des œuvres donne nécessairement lieu à une appropriation individuelle, mais cette dernière se trouve en outre influencée par l’environnement dans lequel évolue le récepteur. Certains nouveaux médias orientent ainsi l’interprétation des productions, mais en font aussi parfois l’objet de détournements.

Modalités de soumission :
Les propositions anonymes sont à envoyer avant le 15 septembre 2023. Elles comporteront une présentation de la problématique et de l’approche retenue (1 page maximum) ainsi qu’une brève bibliographie. Elles pourront être rédigées en français ou en anglais. Les propositions seront examinées anonymement par deux membres du comité scientifique.
Elles sont à envoyer par courriel en fichier attaché (format .doc(x) ET .pdf) aux adresses suivantes :
blandine.pennec@univ-tlse2.fr; nathalie.vincent-arnaud@univ-tlse2.fr
Merci de bien vouloir indiquer clairement dans le corps du message :
– Le nom de l’auteur (des auteurs)
– Son / leur affiliation
– Le titre de la communication

Comité organisateur : Nathalie Vincent-Arnaud, Blandine Pennec, Tiffane Levick, Aurélie Guillain, Emeline Jouve, Henri Le Prieult, Camille Le Gall, Sophie Chadelle, Carline Encarnacion, Sarah Bourse, Zachary Baqué, Eva Gourdoux, Pauline Martos, sous l’égide du CAS.

Comité scientifique :
BAQUÉ Zachary
GUILLAIN Aurélie
JOUVE Emeline
LE PRIEULT Henri
PENNEC Blandine
VINCENT-ARNAUD Nathalie

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